20 septembre 1792: Bataille de Valmy
Suite aux massacres de Septembre, a lieu une bataille décisive
à Valmy, le 20 septembre 1792
Les troupes françaises y affrontent les troupes prussiennes et autrichiennes.
La Bataille de Valmy
Jean-Baptiste Mauzaisse (1784-1844)
Voici la description de la bataille :
« Le 20 septembre au matin, l’armée prussienne se mit en marche, par un brouillard intense, pour venir occuper les hauteurs.
Vers midi le brouillard se déchira un peu, et le jour, en s’élevant, découvrit l’une à l’autre les deux armées.
A ce moment, Brunswick, apercevant dans nos rangs un certain désordre, forme trois colonnes d’attaque et les dirige sur Valmy, s’attendant à voir cette armée de roturiers plier devant la fameuse infanterie du Grand Frédéric.
Kellermann les laisse s’approcher ; au moment où elles vont gravir les pentes, il enflamme ses soldats par le cri de « Vive la Nation ! »
Une canonnade furieuse s’engage. Déconcertés par cette fière attitude, les Prussiens hésitent, et Brunswick, jugeant l’opération manquée, fait rétrograder ses troupes.
La canonnade seule continue jusqu’au soir.
La bataille devait coûtait à peine 200 hommes aux Prussiens, 300 aux Français.
Si l’on ne regarde qu’au sang versé, c’était une escarmouche, « la pétarade de Valmy » ; si l’on mesure les conséquences, c’était un des grands événements de l’histoire. Valmy fit passer toutes les forces morales du côté des Français.
« De ce lieu et de ce jour, date une nouvelle époque de l’histoire du monde. » (Goethe)
Lieu Entre Sainte-Menehould et Valmy
Issue Victoire française
Belligérants Français Prussiens
Commandants Général Kellermann et Général Dumouriez Duc de Brunswick
Forces en présence 50 000 hommes 80 000 hommes
Pertes 300 morts 184 morts
Pendant la Révolution française, la bataille de Valmy, ou plutôt la canonnade, s’est déroulée à Valmy le 20 septembre 1792 opposant la Prusse et la France.
Après que la France eut déclaré la guerre à l’Autriche le 20 avril 1792, les forces anti ou contre-révolutionnaires envahirent la France le 18 août 1792.
Une armée de 150 000 hommes, troupe combinée de la Prusse, de l’Autriche, et de Hessois sous le commandement du duc de Brunswick, représentant du roi Frédéric Guillaume II de Prusse, à laquelle s’étaient joints 20 000 émigrés, s’était d’abord avancée contre la France, sur toute la ligne de ses frontières, entre Dunkerque et la Suisse. Le 12 août, au lever du soleil les troupes légères prussiennes pénètrent sur le territoire français. Le 15, l’armée prussienne vient camper entre Sierck et Luxembourg, et le général Clairfayt, à la tête des Autrichiens, coupe la communication entre Longwy et Montmédy. Le 19 le maréchal Luckner résiste courageusement à une attaque de 22 000 Autrichiens à Fontoy.
Le 20 août, le Prussien remporte la bataille de Verdun : la route de Paris est alors ouverte. Les commandants en chef des armées françaises deviennent suspects ; aussi, avant qu’une action sérieuse puisse être entreprise, les trois armées de Rochambeau, de Lafayette et de Luckner sont réparties entre les généraux Dumouriez et Kellermann.
Le 23 août, après un bombardement de trois jours, Longwy se rend aux alliés qui marchent alors lentement vers Verdun indéfendable.
Le commandant de la place, le colonel Beaurepaire qui défend la place, indigné de la lâcheté du conseil de guerre qui veut capituler, prend un pistolet et se suicide. Le jeune et vaillant Marceau, qui voulait comme Beaurepaire s’ensevelir sous les ruines de la place, finit par se rendre le 3 septembre 1792, après la défaite du 20 août. Il avait perdu ses équipages, ses chevaux, son argent.
« Que voulez-vous qu’on vous rende ? lui demanda un représentant du peuple.
- Un autre sabre pour venger notre défaite. »
Le 2 septembre le duc de Brunswick prend possession de Verdun au nom du roi de France. L’armée d’invasion, réunie à Verdun, est forte de 80 000 hommes. Pressé de parvenir à son but, le roi de Prusse donne ordre, dès le lendemain, à cette armée d’avancer à travers les plaines de la Champagne et de marcher droit sur Paris. Rien ne lui paraît plus facile. Il s’arrête cependant à quelques lieues de Châlons, arrivé au terme de son voyage qui devait être une suite de fêtes et de triomphes.
Mais Dumouriez, qui entraînait ses nouvelles troupes à Valenciennes avec des actions fréquentes mais réduites dans le dessein d’envahir la Belgique, se porte vers l’Argonne par une marche rapide et osée presque sous les yeux de l’avant-garde prussienne et barre la route de Paris, enjoignant à Kellermann de l’assister depuis Metz. Kellermann se déplace mais lentement et, avant qu’il arrive, la partie nord de la ligne de défense est enfoncée. Dumouriez, non intimidé, change le front pour faire face au nord, avec son aile droite dans l’Argonne et sa gauche s’allongeant vers Châlons-sur-Marne et, dans cette position Kellermann fait sa jonction à Sainte-Menehould le 19 septembre 1792.
Dumouriez campe à une lieue en avant de Sainte-Menehould, sur un plateau peu élevé au-dessus des prairies à droite du chemin qui conduit à Châlons. Cette position s’appuie sur la droite à l’Aisne qui descend de Sainte-Menehould, des prairies marécageuses et un étang en couvrent la gauche. Une vallée étroite sépare le camp des hauteurs de l’Iron et de la Lune où campent les Prussiens. Entre ces deux élévations est un bassin de prairies d’où sortent quelques tertres dont le plus élevé est celui qui se trouve couronné par le moulin de Valmy. Deux petites rivières séparent cet espace, elles tombent dans l’Aisne, au-dessus et au-dessous de Sainte-Menehould, l’Auve est au sud et la Bionne est au nord. Le quartier général est placé à Sainte-Menehould à une égale distance du corps d’armée et de l’avant-garde commandée par le général Dillon. Sur la rive droite de l’Auve. Un bataillon de troupes de ligne se trouve dans le château de Saint-Thomas. Vienne-le-Château, Moirmont et la Neuville sont occupés par trois autres bataillons et de la cavalerie. Le front du camp est couvert de batteries qui découvrent le vallon dans tous ses prolongements. La gauche du camp se terme sur le chemin de Châlons, la rive droile de l’Auve est laissée à l’armée de Kellermann.
Kellermann est arrivé le 18 septembre à Dampierre-le-Château d’où il reçoit le soir une dépêche de Dumouriez lui indiquant en arrière et sur la gauche une position excellente, formant équerre avec la sienne. Le lendemain, Kellermann fait passer l’Auve à ses troupes. Mais à peine est-il rendu sur l’emplacement désigné par Dumouriez que, frappé par ses inconvénients, il court à Sainte-Menehould pour faire observer au général en chef combien cette position est dangereuse. La gauche destituée d’appui, est soumise aux hauteurs qui descendent du moulin de Valmy. La droite touche un étang qui gêne sa communication avec la gauche de l’armée de Sainte-Menehould. Le ruisseau d’Auve, seule retraite en cas d’échec, est trop rapproché des arrières du camp. Une armée fuyant en désordre se retrouverait embourbée. Si les deux armées sont attaquées, elles seraient battues par le seul fait du terrain. Kellermann prévient Dumouriez qu’il est décidé à repasser l’Auve le lendemain 20 septembre, à la pointe du jour. Il n’a pas le temps de mettre son plan à exécution. L’ennemi instruit de son arrivée, et jugeant bien la difficulté de sa position, est déjà en marche pour l’attaquer.
Le duc de Brunswick cependant avait passé les défilés du nord et pivoté pour couper Dumouriez de Châlons. À ce moment, la manœuvre prussienne étant presque achevée, Kellermann, commandant en l’absence momentanée de Dumouriez, fait avancer son aile gauche et prend position sur le plateau adossé au moulin entre Sainte-Menehould et Valmy.
Avant trois heures du matin, le 10 septembre, les Prussiens et les Autrichiens sont déjà en mouvement et bientôt l’avant-garde prussienne, commandée par le prince de Hohenlohe-Singelfingen, rencontre celle du général Kellermann, sous les ordres du général Després-Crassier, établie en avant du village de Hans pour éclairer cette partie et couvrir la gauche de l’armée. L’attaque de l’ennemi fait prendre conscience qu’il s’agit d’une affaire sérieuse et non d’une escarmouche d’avant-postes, les coalisés veulent en finir et écraser d’un seul coup les deux petites armées qui s’opposent à leur marche.
L’avant-garde ennemie se porte directement sur Hans, entre la Bienne et la Tourbe, tandis que le gros de l’armée, remonte la rivière, à Somme-Tourbe suivie des Autrichiens du général Clairfayt.
A la première nouvelle de l’attaque de son avant-garde, Kellermann ordonne de plier les tentes, de prendre les armes et de déblayer la route en arrière en faisant filer les équipages par le grand chemin de Sainte-Menehould. Il n’est plus question de repasser l’Auve, le temps presse. L’avant-garde, vigoureusement attaquée, se replie déjà sur l’armée. Kellermann prend aussitôt ses dispositions pour une bataille en règle.
Jusque vers sept heures, un brouillard épais empêche aux deux armées de connaître leurs dispositions respectives. Lorsqu’il se dissipe un peu, l’artillerie commence à tirer de part et d’autre, et le feu se soutient avec vivacité, sans être vraiment meurtrier pour aucun parti. Vers dix heures, Kellermann, placé au centre de la ligne, étudie les manœuvres de l’ennemi lorsque son cheval est tué sous lui d’un coup de canon. Presque dans le même temps, des obus éclatent au milieu du dépôt de munitions et font sauter deux caissons d’artillerie, blessant beaucoup de monde alentour. Dans le désordre ainsi causé, les conducteurs s’enfuient avec leurs caissons. Faute de munitions, le feu diminue d’intensité. Une partie de l’infanterie opère alors un mouvement de recul et ajoute à la confusion générale. Kellermann s’y rend en personne, et reprend la première position.
Le duc de Brunswick voyant que le feu de son artillerie n’a pas réussi à ébranler les troupes françaises, veut essayer une attaque de vive force. Vers les onze heures, le feu de ses batteries redouble. Il forme trois colonnes d’attaque soutenues par la cavalerie. Les deux colonnes de gauche se dirigent sur le moulin de Valmy, la droite se tenant à distance. Ces attaques en ordre oblique sont la tactique habituelle des Prussiens.
Kellerman comprend que dans cet état d’esprit, il n’est pas non plus possible de maintenir la discipline tout en restant statique. Aussi, il ordonne d’avancer. Il dispose son armée en colonnes par bataillon. Quand elles sont formées, il les parcourt et leur adresse cette courte harangue : « Camarades, voilà le moment de la victoire ; laissons avancer l’ennemi sans tirer un seul coup de fusil, et chargeons-le à la baïonnette. »
L’armée, pleine d’enthousiasme et déjà aguerrie par une canonnade de quatre heures, répond aux paroles de son général par des cris multipliés de : Vive la nation ! Kellermann lui-même met son chapeau au bout de son sabre et répète : Vive la nation ! En un instant, tous les chapeaux sont sur les baïonnettes et un immense cri s’élève de tous les rangs de l’armée.
Ces mouvements, cet enthousiasme, annonce une armée qui brûle de combattre. L’ennemi s’étonne, ses colonnes s’arrêtent : "La victoire est à nous !" crie Kellermann, et l’artillerie, dont le feu redouble, foudroie les têtes de colonnes prussiennes. Devant tant de détermination, le duc de Bruswick donne le signal de la retraite.
Le feu continue jusqu’à quatre heures du soir. Encore une fois l’ennemi reforme ses colonnes et essaie une nouvelle attaque. Mais la bonne contenance de l’armée française, son ardeur manifestée par de nouveaux cris, suffit à l’arrêter une seconde fois. Vers sept heures du soir, les coalisés regagnent leurs premières positions, laissant aux Français le champ de bataille jonché de morts.
La retraite des Prussiens étonne bien des observateurs. Les suppositions vont bon train : le duc de Brunswick n’aurait-il pas été acheté par Georges Danton avec les diamants de la couronne royale de France, volés quatre jours plus tôt (16 septembre 1792) au garde-meuble ?[2]. Mais il faut aussi tenir compte du mauvais temps, de l’état de santé médiocre des Prussiens (dysenterie provoquée par la consommation des raisins verts, le ravitaillement étant coupé). Quelques jours plus tôt, l’invasion de la Pologne par la Russie et l’Autriche a commencé. Or, la Prusse a besoin de cette armée pour participer au partage.
La bataille restera marquée surtout par une intense canonnade au cours de laquelle la nouvelle artillerie française créée par Gribeauval marque sa supériorité. Les deux armées ont assisté à la bataille sans vraiment y prendre part. Il n’y a finalement que 300 morts côté français, 184 chez les Prussiens.
Dumouriez a pris toutes ses dispositions pour venir au secours de Kellermann en cas d’échec, ou pour prendre part à l’affaire si elle devenait générale. Clairfayt s’est contenté de montrer trois têtes de colonnes vers Valmy et Maffrievart pour tenir les Français dans l’incertitude et menacer en même temps la tête du camp de Sainte-Menehould et les derrières de la droite de Kellermann. Le duc de Brunswick était si sûr de vaincre, qu’il avait cru pouvoir se passer de l’assistance efficace de Clairfayt et des Autrichiens.
A la bataille de Valmy, Il y eut 24 000 Français d’engagés contre 100 000 Austro-Prussiens... Dans cette journée, Kellermann avait sauvé la patrie et révélé aux Français le secret de leur valeur. C’en est fait, la coalition est vaincue sur ce point. 80 000 ennemis, qui avaient marché comme en triomphe, s’arrêtent, saisis de crainte, et l’armée française qui, jusque-là, avait redouté son inexpérience, devant des soldats aguerris et disciplinés, s’aperçoit que le courage et le patriotisme peuvent la rendre redoutable, jusqu’au moment où la discipline viendra l’égaler d’abord, pour l’élever bientôt au-dessus de ces Prussiens et de ces Autrichiens si renommés.
Le lendemain, 21 septembre, la nouvelle parvient à Paris. Assurée de la sauvegarde du pays, sûre de sa force, la Convention nationale proclame la République. Ce même jour, Kellermann, dont la position, malgré la retraite de l’ennemi, n’en est pas moins hasardeuse, s’établit sur les hauteurs de Voilemont, son front couvert par l’Auve et sa droite appuyée sur la gauche de Dumouriez.
La bataille de Valmy est à l’origine du mythe du citoyen en arme qui va fonder la conscription (ou service militaire). On sait que les conséquences de cette bataille furent l’évacuation du territoire français par l’armée coalisée le 22 octobre suivant.
* Augustin Daniel Belliard (1766-1832), député, capitaine des engagés volontaires, lors de la bataille, au milieu de la canonnade, il transmet d’un corps d’armée à un autre, les ordres de Beurnonville. * Jean Ernest de Beurmann (1775-1850), alors capitaine. * Charles François Dumouriez (1739-1823), général, il commandait une partie des troupes. * Pierre Dupont de l’Étang (1765-1840), alors adjudant général lieutenant-colonel, il combattit vaillamment. * Dominique François Xavier Félix (1763-1839), alors adjudant-général, il prit une part glorieuse à la bataille. * Joseph Diaz Gergonne (1771-1859). * Paul Grenier (1768-1827, alors capitaine. * François Christophe Kellermann (1735-1820), général, il commandait une partie des troupes. * Choderlos de Laclos (1741-1803), écrivain français, (auteur des Liaisons Dangereuses), Commissaire au ministère de la Guerre où il a la charge de réorganiser les troupes de la jeune République, grâce à ses activités, il participe de façon décisive à la victoire. * Adelaïde Blaise François Le Lièvre de La Grange (1766-1833), alors colonel. * Louis-François Lejeune (1775-1848), alors engagé volontaire. * Nicolas Luckner (1722 et mort guillotiné à Paris en 1794), est un militaire français d’origine germanique. Maréchal de France en 1791, commandement de l’armée du Nord, il est relevé de ses fonctions. * Jean Bernard Gauthier de Murnan, (1748-1796), alors colonel. * Louis-Philippe d’Orléans (1773-1850), alors lieutenant-général. * Pierre Claude Pajol (1772-1844), alors lieutenant des grenadiers des futures colonnes infernales. * Auguste Marie Henri Picot, marquis de Dampierre (1756-1793), alors colonel. * Jacques Marguerite Pilotte, alors colonel. * Gabriel Adrien Marie Poissonnier Desperrières (1763-1852), alors colonel, il commandait 2 500 grenadiers qui firent des prodiges de valeur à la bataille. * Pierre Riel de Beurnonville (1773-1850), alors lieutenant-général, il commandait de l’avant-garde de Dumouriez. * David Maurice Joseph de Saint-Maurice de la Redorte (1768-1833), alors capitaine. * Jean Baptiste Donatien de Vimeur, comte de Rochambeau (1752-1821), général, il commandait une partie des troupes. * Claude Testot-Ferry (1773-1856), alors engagé volontaire. * Benjamin Zix (1772-1811), dessinateur au quartier général de la Grande Armée, il a réalisé les croquis de la bataille.
* Charles-Guillaume-Ferdinand, duc de Brunswick-Lunebourg (1735-1806), général et prince allemand. Il commandait les forces attaquantes. * Charles Joseph de Croix, comte de Clerfait (1733-1798), il commandait le corps des 12.000 Autrichiens et coupe la communication entre Longwy et Montmédy. * Louis de Frotté (1766-1800), alors colonel-général des forces émigrées. * Johann Wolfgang von Goethe (1749-1832), poète, romancier et dramaturge allemand, également scientifique, il est à la bataille de Valmy aux côtés du duc de Saxe-Weimar.
Le 20 avril 1792, Louis XVI et l’Assemblée, entraînée par les Girondins, déclarent la guerre au roi de Bohême et de Hongrie (c’est-à-dire l’Autriche), rapidement soutenu par la Prusse. L’armée française, affaiblie par le départ de nombreux officiers hostiles à la Révolution, subit des défaites. L’Assemblée proclame La Patrie en danger et fait appel à des volontaires qui s’engagent par milliers. Des Fédérés affluent de province, notamment de Marseille. Ces derniers défilent à Paris au son d’un chant martial composé par Rouget de l’Isle et qui deviendra La Marseillaise.
Dans ce contexte de fièvre patriotique, le duc de Brunswick, commandant l’armée prussienne, commet la maladresse de menacer Paris de destruction si « la moindre violence est faite au roi ». Le peuple réplique au Manifeste de Brunswick par La prise des Tuileries, le 10 août 1792. Sous la pression de la foule, l’Assemblée suspend le roi, le remplace par un Conseil exécutif provisoire et accepte de convoquer une Convention (terme emprunté à la révolution américaine et qui désigne une assemblée chargée à la fois d’établir une constitution et d’exercer provisoirement l’intégralité du pouvoir) élue au suffrage universel pour doter la France d’un nouveau régime. La tentative de monarchie constitutionnelle a donc échoué.
Fin août, les armées autrichiennes et prussiennes pénètrent en France. Le 2 septembre, Verdun capitule. La route de Paris est ouverte.
Des artisans et des boutiquiers se ruent vers les prisons parisiennes, improvisent des tribunaux populaires et procèdent à des exécutions sommaires. Ces Massacres de septembre font plus de 1000 victimes. Les Girondins condamnent vigoureusement ces excès.
En Champagne, les collines de l’Argonne, où le général Dumouriez concentre ses troupes, sont le seul obstacle à l’invasion.
Jules Michelet -né à Paris en 1798, élu membre de l’Académie des sciences morales et politiques en 1838, mort à Hyères en 1874- est souvent appelé « l’historien de la France ». Fils d’un imprimeur ruiné par les lois napoléoniennes sur l’imprimerie, il parvient quand même à suivre les cours du lycée Charlemagne. Elève brillant, il est bachelier ès lettres à dix-neuf ans, licencié à vingt, docteur ès lettres à vingt et un avec une thèse sur Les Vies de hommes illustres de Plutarque et agrégé à vingt-trois ans.
La Révolution de 1830 fait naître chez lui l’enthousiasme pour les idées libérales et la conviction que toute l’Histoire de France est une longue lutte du peuple contre le despotisme (les institutions républicaines ont pour fin d’harmoniser les classes sociales.)
Chef de la section historique aux Archives nationales de 1831 à 1852 et travailleur infatigable, Michelet est maître de son récit, des causalités et des sources d’archives. Il est aussi le maître des mythes républicains.
Son humanisme, sa personnalité, sont inséparables de son œuvre d’enseignant et d’écrivain. L’objectivité en souffre mais une poésie en jaillit, ainsi qu’une philosophie de l’histoire : il croit au progrès de l’humanité et il s’efforce de montrer que le peuple détermine le cours des évènements.
De 1846 à 1853 Michelet consacre huit années de sa vie à écrire cinq années de l’histoire de France : 1789-1794. Son œuvre maîtresse, l’Histoire de la Révolution Française est une fresque monumentale et un des sommets de l’historiographie du XIX° siècle.
Dans le tome IV, paru le 10 février 1850, son récit va de la dernière journée révolutionnaire à ses yeux, le 10 août 1792, à la décadence définitive des Girondins après la victoire de Jemmapes en novembre 1792.
Le chapitre VIII du « livre »VII raconte la victoire de Valmy : « Chaque jour, 1.800 volontaires partaient de Paris, et cela jusqu’à 20.000. Il y en aurait eu bien d’autres, si on ne les eût retenus. L’Assemblée fut obligée d’attacher à leurs ateliers les typographes qui imprimaient ses séances. Il lui fallut décréter que telles classes d’ouvriers, les serruriers, par exemple, utiles pour faire des armes, ne devaient pas partir eux-mêmes. Il ne serait plus resté personne pour en forger. Les églises présentaient un spectacle extraordinaire, tel que, depuis plusieurs siècles, elles n’en offraient plus. Elles avaient repris le caractère municipal et politique qu’elles eurent au moyen-âge. Les assemblées des sections qui s’y tenaient rappelaient celles des anciennes communes de France, ou des municipes italiens, qui s’assemblaient dans les églises. La cloche, ce grand instrument populaire dont le clergé s’est donné le monopole, était redevenue ce qu’elle fut alors, la grande voix de la cité, — l’appel au peuple. Les églises du moyen-âge avaient parfois reçu les foires, les réunions commerciales. En 92, elles offrirent un spectacle analogue (mais moins mercantile, plus touchant), les réunions d’industrie patriotique, qui travaillaient pour le salut commun. On y avait rassemblé des milliers de femmes pour préparer les tentes, les habits, les équipements militaires. Elles travaillaient, et elles étaient heureuses, sentant que, dans ce travail, elles couvraient, habillaient leurs pères ou leurs fils. A l’entrée de cette rude campagne d’hiver qui se préparait pour tant d’hommes jusque-là fixés au foyer, elles réchauffaient d’avance ce pauvre abri du soldat de leur souffle et de leur cœur. Près de ces ateliers de femmes, les églises même offraient des scènes mystérieuses et terribles, de nombreuses exhumations.
Il avait été décidé qu’on emploierait pour l’armée le cuivre et le plomb des cercueils. — Pourquoi non ? Et comment a-t-on si cruellement injurié les hommes de 92, pour ce remuement des tombeaux ? Quoi donc la France des vivants, si près de périr, n’avait pas droit de demander secours à la France des morts, et d’en obtenir des armes ? S’il faut, pour juger un tel acte, savoir la pensée des morts même, l’historien répondra, sans hésiter, au nom de nos pères dont on ouvrit les tombeaux, qu’ils les auraient donnés pour sauver leurs petits-fils. — Ah ! si les meilleurs de ces morts avaient été interrogés, si l’on avait pu savoir là-dessus l’avis d’un Vauban, d’un Colbert, d’un Catinat, d’un chancelier l’Hôpital, de tous ces grands citoyens, si l’on eût consulté l’oracle de celle qui mérita un tombeau ? Non, un autel, la Pucelle d’Orléans.... toute cette vieille France héroïque aurait répondu : N’hésitez pas, ouvrez, fouillez, prenez nos cercueils, ce n’est pas assez, nos ossements. Tout ce qui reste de nous, portez-le, sans hésiter, au-devant de l’ennemi. Un sentiment tout semblable fit vibrer la France en ce qu’elle eut de plus profond, quand un cercueil, en effet, la traversa, rapporté de la frontière, celui de l’immortel Beaurepaire, qui, non pas par des paroles, mais d’un acte et d’un seul coup, lui dit ce qu’elle devait faire en sa grande circonstance. Beaurepaire, ancien officier des carabiniers, avait formé, commandé, depuis 89, l’intrépide bataillon des volontaires de Maine-et-Loire. Au moment de l’invasion, ces braves eurent peur de n’arriver pas assez vite. Ils ne s’amusèrent pas à parler en route, traversèrent toute la France au pas de charge, et se jetèrent dans Verdun. Ils avaient un pressentiment qu’au milieu des trahisons dont ils étaient environnés, ils devaient périr. Ils chargèrent un député patriote de faire leurs adieux à leurs familles, de les consoler et de dire qu’ils étaient morts. — Beaurepaire venait de se marier, il quittait sa jeune femme, et il n’en fut pas moins ferme. Le commandant de Verdun assemblant un conseil de guerre pour être autorisé à rendre la place, Beaurepaire résista à tous les arguments de la lâcheté. Voyant enfin qu’il ne gagnait rien sur ces nobles officiers dont le cœur, tout royaliste, était déjà dans l’autre camp :" Messieurs, dit-il, j’ai juré de ne me rendre que mort... Survivez à votre honte... Je suis fidèle à mon serment ; voici mon dernier mot, je meurs...". Il se fit sauter la cervelle. La France se reconnut, frémit d’admiration. Elle se mit la main sur le cœur, et y sentit monter la foi. La patrie ne flotta plus aux regards, incertaine et vague ; on la vit réelle, vivante. On ne doute guère des Dieux à qui l’on sacrifie ainsi.
C’était avec un véritable sentiment religieux que des milliers d’hommes, à peine armés, mal équipés encore, demandaient à traverser l’Assemblée nationale. Leurs paroles, souvent emphatiques et déclamatoires, qui témoignent de leur impuissance pour exprimer ce qu’ils sentaient, n’en sont pas moins empreintes du sentiment très-vif de foi qui remplissait leur cœur. Ce n’est pas dans les discours préparés de leurs orateurs qu’il faut chercher ces sentiments, mais dans les cris, les exclamations qui s’échappent de leur poitrine. Nous venons comme à l’église, disait l’un. — Et un autre : Pères de la patrie, nous voici ! Vous bénirez vos enfants. Le sacrifice fut, dans ces jours, véritablement universel, immense et sans bornes. Plusieurs centaines de mille donnèrent leurs corps et leur vie, d’autres leur fortune, tous leurs cœurs, d’un même élan..."
Nous vous invitons à découvrir la suite du texte de l’Académicien Jules Michelet, en cliquant en bas de page sur « Document joint - Michelet »
Du regard de l’académicien Jules Michelet passons à un autre académicien Arthur Chuquet :
Arthur Maxime Chuquet, né en 1853 à Rocroi et mort en 1925 à Villemomble, est un critique et un historien français, spécialiste de l’Allemagne et de la période révolutionnaire. Fils d’un fonctionnaire de la douane établi à Metz, bachelier ès lettres en 1870, il sert, la même année, dans la garde nationale à Metz. En 1871 il entre à l’École normale supérieure où il étudie l’histoire et la littérature.
En 1874 il part faire un voyage d’étude en Allemagne, il suit les cours des universités de Leipzig et de Berlin. Agrégé d’allemand en 1876, Chuquet commence à exercer au Lycée Saint-Louis de Paris. En 1886 il devient professeur de littérature allemande à l’École normale supérieure. Il passe sa thèse sur La Campagne d’Argonne de 1792 en 1887.
Directeur de publication de la Revue critique d’histoire et de la littérature, collaborateur de grandes revues étrangères et titulaire de la chaire de Langues et littérature d’origine germanique au Collège de France à partir de 1893, Arthur Chuquet est élu membre de l’Académie des sciences morales et politiques en 1900. De 1901 à 1921, il est professeur d’allemand à l’École supérieure de guerre à Paris.
Dès 1886 il commence à écrire un nombre impressionnant d’ouvrages
portant pour la plupart, non pas seulement sur sa « spécialité », la littérature germanique, mais sur l’histoire militaire de la Révolution et de l’Empire dont il devient "Le" spécialiste de sa génération.
Les titres les plus importants sont sa série de onze volumes Les guerres de la révolution, les trois tomes de sa Jeunesse de Napoléon. Il écrit également des études de campagnes militaires particulières et des études biographiques de militaires de l’époque révolutionnaire comme par exemple : Dumouriez, Charles de Hesse, Hoche, Desaix, Kléber, Marceau.
La liste de ses ouvrages est longue et avec ses nombreuses publications, Arthur Chuquet fait partie des pionniers des études révolutionnaires et militaires. Son nom figure sur toutes les bibliographies mais… il est peu connu du grand public. C’est pourtant un personnage intéressant et un grand historien de la Révolution française selon les critères en vigueur à son époque.
Ses partis-pris historiques sont favorables au mythe de l’honneur français maintenu par l’armée contre les « excès » révolutionnaires. Associé au groupe des républicains radicaux admirateurs de la Révolution, il donne à sa plume une tonalité politique qui le démarque de la plupart des écrivains-militaires de la fin du XIX° siècle et du début du XX° siècle, aux idées le plus souvent, conservatrices.
Les Guerres de la révolution sont publiées pendant les années 1887-1896.
Dans le tome 2, intitulé : Valmy, Arthur Chuquet nous conduit sur les collines de l’Argonne…non loin du moulin de Valmy… voici donc la lecture d’extraits de son Histoire…
LES GUERRES DE REVOLUTION : 2. Valmy (1887) - Arthur Chuquet (1) - « Deux lignes de hauteurs d’une glaise aride, s’élèvent parallèlement l’une à l’autre en avant de Sainte–Menehould, à droite de la grande route qui mène à Châlons, non loin de Bionne. La première ligne servait de camp à l’armée de Dumouriez. La seconde est séparée de la première par une vallée assez étroite, couverte à cette époque de profonds marécages, et comprend deux hauteurs : le mont d’Yvron et le tertre de Valmy. Le mont d’Yvron s’étend entre la Bionne et la butte de Valmy. Le tertre de Valmy, séparé de l’Yvron par une prairie où coule, durant quatre mois de l’année, le petit ruisseau de Coupré, doit son nom au village qui se cache derrière lui, dans le bas du vallon. Sa crête est étroite et escarpée ; elle était alors couronnée d’un moulin à vent qu’on voyait de très loin. Durant la journée du 20 Septembre, l’Yvron devait être occupé par l’avant-garde Dumouriez, et le tertre de Valmy, ou, comme on disait à cette époque, la butte du moulin, par le gros de l’armée Kellermann.
La grande route de Sainte-Menehould à Châlons laisse donc à sa droite l’Yvron et (à une petite lieue) le village de Valmy, à gauche Dampierre-sur-Auve et Gizaucourt. Elle passe par Dommartin-la-planchette, Orbeval et la Lune, pour descendre de là, presque en ligne droite jusqu’à Châlons, à travers une grande et triste plaine dont le sol crayeux commence à se couvrir de sapinières. C’est la route que Louis XVI avait suivie quinze mois auparavant, et suivie deux fois, la première fois en plein silence, heureux et se livrant à l’espoir, la seconde fois, abattu, désespéré, environné de gardes nationaux qui venaient en foule des villages du Clermontois, au son du tocsin, brandissant leurs fusils et leurs faux, criant non pas « vive le roi » mais « vive la nation » et « vivent les patriotes ». Orbeval était alors la première maison de poste avant Sainte-Menehould ; c’est là que l’inquiétude avait saisi les fugitifs qui ne voyaient venir aucun des détachements promis par M ; de Bouillé. C’est à Sainte-Menehould que le maitre de poste Drouet avait reconnu Louis XVI. C’est la descente de Dommartin-la-planchette, au bas de la Grèverie, que le comte de Dampierre, seigneur de Hans, avait été massacré sous les yeux de la famille royale, qui reprenait captive le chemin de Paris et peut être, le 22Juin 1791, en passant pour la seconde fois à Orbeval, Louis XI vit-il à droite de la route le moulin de Valmy. Il ne se doutait guère que sa destinée se déciderait irrévocablement l’année suivant près de ce moulin, et qu’au milieu des mornes plaines qu’il traversait, l’armée étrangère, désormais son unique espoir, viendrait s’épuiser dans l’inaction, la misère et la faim. La route en parlant d’Orbeval, s’élève par une longue rampe jusqu’à l’endroit où aboutissent deux chemins de traverse, celui de Somme-Bionne et celui de Gizaucourt. Ce carrefour porte le nom de la Lune qu’il doit, dit-on, à sa forme circulaire. On aperçoit de là Orbeval, Dommartin-la-planchette, le tertre de Valmy et la chaine de l’Argonne qui dessine dans le lointain ses sommets boisés. Il y avait alors au bord de la route une maison isolée qu’on nommait l’auberge – ou la cense – de la Lune. Ce lieu est très aride, sans plantation et sans ombrage, sans ruisseau, sans la moindre source ; il faut chercher l’eau jusqu’aux villages de Gizaucourt, de la Chapelle et de Saint-Mard où passe la rivière d’Auve. Au nord-est s’étend une plaine immense très fertile en froments ; mais au sud-ouest le sol, formé d’un calcaire crayeux, que recouvre à peine une légère couche de terre végétale, ne produit que des seigles et des marsages ; aussi, la limite de ce terroir stérile a-t-elle reçu le nom expressif de marche à famine. C’est sur ce plateau triste et désolé, le plateau de la Lune, que l’armée prussienne s’établit dans la journée du 20 septembre ; c’est de là que son artillerie canonna le tertre de Valmy ; c’et là qu’elle campa durant dix jours, en proie au découragement et à la dysenterie, dans de boueux bivouacs.
Kellermann était arrivé le 18 Septembre à Dampierre-le-château, dans la vallée de l’Yèvre, à quatre lieues de Sainte-Menehould. Il avait avec lui dix-sept bataillons d’infanterie et trente escadrons, en tout seize mille hommes. Il se hâta, sur le conseil e Dumouriez, d’envoyer au camp de Braux quelques détachements dont l’arrivée remplit les soldats de confiance et de joie ; l’armée des Ardennes était certaine désormais que l’armée du Centre venait à son secours et combattrait avec elle. »
Nous vous invitons à découvrir la suite de ce texte de Arthur Chuquet, en cliquant sur « Document joint - Chuquet » en bas de page.
Une seconde émission de la série « Les Académiciens racontent l’Histoire » vous permettra de découvrir d’autres textes d’Arthur Chuquet ; l’Académicien poursuivra le récit de cette journée mémorable ; vous pourrez écouter également des textes d’un autre historien, membre de l’Institut : Victor Duruy qui vous décrira le dénouement de cette bataille.
Site et Moulin de Valmy monument historique à 51800 - VALMY Tel. : +33 (0)3 26 60 85 83 tourisme@argonne.fr Voir le site web Dates d’ouverture :Du 01/01/2012 au 31/12/2012
Le 20 avril 1792, Louis XVI et l’Assemblée, entraînée par les Girondins, déclarent la guerre au roi de Bohême et de Hongrie (c’est-à-dire l’Autriche), rapidement soutenu par la Prusse. L’armée française, affaiblie par le départ de nombreux officiers hostiles à la Révolution, subit des défaites. L’Assemblée proclame La Patrie en danger et fait appel à des volontaires qui s’engagent par milliers. Des Fédérés affluent de province, notamment de Marseille. Ces derniers défilent à Paris au son d’un chant martial composé par Rouget de l’Isle et qui deviendra La Marseillaise.
Dans ce contexte de fièvre patriotique, le duc de Brunswick, commandant l’armée prussienne, commet la maladresse de menacer Paris de destruction si « la moindre violence est faite au roi ». Le peuple réplique au Manifeste de Brunswick par La prise des Tuileries, le 10 août 1792. Sous la pression de la foule, l’Assemblée suspend le roi, le remplace par un Conseil exécutif provisoire et accepte de convoquer une Convention (terme emprunté à la révolution américaine et qui désigne une assemblée chargée à la fois d’établir une constitution et d’exercer provisoirement l’intégralité du pouvoir) élue au suffrage universel pour doter la France d’un nouveau régime. La tentative de monarchie constitutionnelle a donc échoué.
Fin août, les armées autrichiennes et prussiennes pénètrent en France. Le 2 septembre, Verdun capitule. La route de Paris est ouverte.
Des artisans et des boutiquiers se ruent vers les prisons parisiennes, improvisent des tribunaux populaires et procèdent à des exécutions sommaires. Ces Massacres de septembre font plus de 1000 victimes. Les Girondins condamnent vigoureusement ces excès.
En Champagne, les collines de l’Argonne, où le général Dumouriez concentre ses troupes, sont le seul obstacle à l’invasion.
Jules Michelet -né à Paris en 1798, élu membre de l’Académie des sciences morales et politiques en 1838, mort à Hyères en 1874- est souvent appelé « l’historien de la France ». Fils d’un imprimeur ruiné par les lois napoléoniennes sur l’imprimerie, il parvient quand même à suivre les cours du lycée Charlemagne. Elève brillant, il est bachelier ès lettres à dix-neuf ans, licencié à vingt, docteur ès lettres à vingt et un avec une thèse sur Les Vies de hommes illustres de Plutarque et agrégé à vingt-trois ans.
La Révolution de 1830 fait naître chez lui l’enthousiasme pour les idées libérales et la conviction que toute l’Histoire de France est une longue lutte du peuple contre le despotisme (les institutions républicaines ont pour fin d’harmoniser les classes sociales.)
Chef de la section historique aux Archives nationales de 1831 à 1852 et travailleur infatigable, Michelet est maître de son récit, des causalités et des sources d’archives. Il est aussi le maître des mythes républicains.
Son humanisme, sa personnalité, sont inséparables de son œuvre d’enseignant et d’écrivain. L’objectivité en souffre mais une poésie en jaillit, ainsi qu’une philosophie de l’histoire : il croit au progrès de l’humanité et il s’efforce de montrer que le peuple détermine le cours des évènements.
De 1846 à 1853 Michelet consacre huit années de sa vie à écrire cinq années de l’histoire de France : 1789-1794. Son œuvre maîtresse, l’Histoire de la Révolution Française est une fresque monumentale et un des sommets de l’historiographie du XIX° siècle.
Dans le tome IV, paru le 10 février 1850, son récit va de la dernière journée révolutionnaire à ses yeux, le 10 août 1792, à la décadence définitive des Girondins après la victoire de Jemmapes en novembre 1792.
Le chapitre VIII du « livre »VII raconte la victoire de Valmy : « Chaque jour, 1.800 volontaires partaient de Paris, et cela jusqu’à 20.000. Il y en aurait eu bien d’autres, si on ne les eût retenus. L’Assemblée fut obligée d’attacher à leurs ateliers les typographes qui imprimaient ses séances. Il lui fallut décréter que telles classes d’ouvriers, les serruriers, par exemple, utiles pour faire des armes, ne devaient pas partir eux-mêmes. Il ne serait plus resté personne pour en forger. Les églises présentaient un spectacle extraordinaire, tel que, depuis plusieurs siècles, elles n’en offraient plus. Elles avaient repris le caractère municipal et politique qu’elles eurent au moyen-âge. Les assemblées des sections qui s’y tenaient rappelaient celles des anciennes communes de France, ou des municipes italiens, qui s’assemblaient dans les églises. La cloche, ce grand instrument populaire dont le clergé s’est donné le monopole, était redevenue ce qu’elle fut alors, la grande voix de la cité, — l’appel au peuple. Les églises du moyen-âge avaient parfois reçu les foires, les réunions commerciales. En 92, elles offrirent un spectacle analogue (mais moins mercantile, plus touchant), les réunions d’industrie patriotique, qui travaillaient pour le salut commun. On y avait rassemblé des milliers de femmes pour préparer les tentes, les habits, les équipements militaires. Elles travaillaient, et elles étaient heureuses, sentant que, dans ce travail, elles couvraient, habillaient leurs pères ou leurs fils. A l’entrée de cette rude campagne d’hiver qui se préparait pour tant d’hommes jusque-là fixés au foyer, elles réchauffaient d’avance ce pauvre abri du soldat de leur souffle et de leur cœur. Près de ces ateliers de femmes, les églises même offraient des scènes mystérieuses et terribles, de nombreuses exhumations.
Il avait été décidé qu’on emploierait pour l’armée le cuivre et le plomb des cercueils. — Pourquoi non ? Et comment a-t-on si cruellement injurié les hommes de 92, pour ce remuement des tombeaux ? Quoi donc la France des vivants, si près de périr, n’avait pas droit de demander secours à la France des morts, et d’en obtenir des armes ? S’il faut, pour juger un tel acte, savoir la pensée des morts même, l’historien répondra, sans hésiter, au nom de nos pères dont on ouvrit les tombeaux, qu’ils les auraient donnés pour sauver leurs petits-fils. — Ah ! si les meilleurs de ces morts avaient été interrogés, si l’on avait pu savoir là-dessus l’avis d’un Vauban, d’un Colbert, d’un Catinat, d’un chancelier l’Hôpital, de tous ces grands citoyens, si l’on eût consulté l’oracle de celle qui mérita un tombeau ? Non, un autel, la Pucelle d’Orléans.... toute cette vieille France héroïque aurait répondu : N’hésitez pas, ouvrez, fouillez, prenez nos cercueils, ce n’est pas assez, nos ossements. Tout ce qui reste de nous, portez-le, sans hésiter, au-devant de l’ennemi. Un sentiment tout semblable fit vibrer la France en ce qu’elle eut de plus profond, quand un cercueil, en effet, la traversa, rapporté de la frontière, celui de l’immortel Beaurepaire, qui, non pas par des paroles, mais d’un acte et d’un seul coup, lui dit ce qu’elle devait faire en sa grande circonstance. Beaurepaire, ancien officier des carabiniers, avait formé, commandé, depuis 89, l’intrépide bataillon des volontaires de Maine-et-Loire. Au moment de l’invasion, ces braves eurent peur de n’arriver pas assez vite. Ils ne s’amusèrent pas à parler en route, traversèrent toute la France au pas de charge, et se jetèrent dans Verdun. Ils avaient un pressentiment qu’au milieu des trahisons dont ils étaient environnés, ils devaient périr. Ils chargèrent un député patriote de faire leurs adieux à leurs familles, de les consoler et de dire qu’ils étaient morts. — Beaurepaire venait de se marier, il quittait sa jeune femme, et il n’en fut pas moins ferme. Le commandant de Verdun assemblant un conseil de guerre pour être autorisé à rendre la place, Beaurepaire résista à tous les arguments de la lâcheté. Voyant enfin qu’il ne gagnait rien sur ces nobles officiers dont le cœur, tout royaliste, était déjà dans l’autre camp :" Messieurs, dit-il, j’ai juré de ne me rendre que mort... Survivez à votre honte... Je suis fidèle à mon serment ; voici mon dernier mot, je meurs...". Il se fit sauter la cervelle. La France se reconnut, frémit d’admiration. Elle se mit la main sur le cœur, et y sentit monter la foi. La patrie ne flotta plus aux regards, incertaine et vague ; on la vit réelle, vivante. On ne doute guère des Dieux à qui l’on sacrifie ainsi.
C’était avec un véritable sentiment religieux que des milliers d’hommes, à peine armés, mal équipés encore, demandaient à traverser l’Assemblée nationale. Leurs paroles, souvent emphatiques et déclamatoires, qui témoignent de leur impuissance pour exprimer ce qu’ils sentaient, n’en sont pas moins empreintes du sentiment très-vif de foi qui remplissait leur cœur. Ce n’est pas dans les discours préparés de leurs orateurs qu’il faut chercher ces sentiments, mais dans les cris, les exclamations qui s’échappent de leur poitrine. Nous venons comme à l’église, disait l’un. — Et un autre : Pères de la patrie, nous voici ! Vous bénirez vos enfants. Le sacrifice fut, dans ces jours, véritablement universel, immense et sans bornes. Plusieurs centaines de mille donnèrent leurs corps et leur vie, d’autres leur fortune, tous leurs cœurs, d’un même élan..."
Nous vous invitons à découvrir la suite du texte de l’Académicien Jules Michelet, en cliquant en bas de page sur « Document joint - Michelet »
Du regard de l’académicien Jules Michelet passons à un autre académicien Arthur Chuquet :
Arthur Maxime Chuquet, né en 1853 à Rocroi et mort en 1925 à Villemomble, est un critique et un historien français, spécialiste de l’Allemagne et de la période révolutionnaire. Fils d’un fonctionnaire de la douane établi à Metz, bachelier ès lettres en 1870, il sert, la même année, dans la garde nationale à Metz. En 1871 il entre à l’École normale supérieure où il étudie l’histoire et la littérature.
En 1874 il part faire un voyage d’étude en Allemagne, il suit les cours des universités de Leipzig et de Berlin. Agrégé d’allemand en 1876, Chuquet commence à exercer au Lycée Saint-Louis de Paris. En 1886 il devient professeur de littérature allemande à l’École normale supérieure. Il passe sa thèse sur La Campagne d’Argonne de 1792 en 1887.
Directeur de publication de la Revue critique d’histoire et de la littérature, collaborateur de grandes revues étrangères et titulaire de la chaire de Langues et littérature d’origine germanique au Collège de France à partir de 1893, Arthur Chuquet est élu membre de l’Académie des sciences morales et politiques en 1900. De 1901 à 1921, il est professeur d’allemand à l’École supérieure de guerre à Paris.
Dès 1886 il commence à écrire un nombre impressionnant d’ouvrages
portant pour la plupart, non pas seulement sur sa « spécialité », la littérature germanique, mais sur l’histoire militaire de la Révolution et de l’Empire dont il devient "Le" spécialiste de sa génération.
Les titres les plus importants sont sa série de onze volumes Les guerres de la révolution, les trois tomes de sa Jeunesse de Napoléon. Il écrit également des études de campagnes militaires particulières et des études biographiques de militaires de l’époque révolutionnaire comme par exemple : Dumouriez, Charles de Hesse, Hoche, Desaix, Kléber, Marceau.
La liste de ses ouvrages est longue et avec ses nombreuses publications, Arthur Chuquet fait partie des pionniers des études révolutionnaires et militaires. Son nom figure sur toutes les bibliographies mais… il est peu connu du grand public. C’est pourtant un personnage intéressant et un grand historien de la Révolution française selon les critères en vigueur à son époque.
Ses partis-pris historiques sont favorables au mythe de l’honneur français maintenu par l’armée contre les « excès » révolutionnaires. Associé au groupe des républicains radicaux admirateurs de la Révolution, il donne à sa plume une tonalité politique qui le démarque de la plupart des écrivains-militaires de la fin du XIX° siècle et du début du XX° siècle, aux idées le plus souvent, conservatrices.
Les Guerres de la révolution sont publiées pendant les années 1887-1896.
Dans le tome 2, intitulé : Valmy, Arthur Chuquet nous conduit sur les collines de l’Argonne…non loin du moulin de Valmy… voici donc la lecture d’extraits de son Histoire…
ss="spip"> LES GUERRES DE REVOLUTION : 2. Valmy (1887) - Arthur Chuquet (1) - « Deux lignes de hauteurs d’une glaise aride, s’élèvent parallèlement l’une à l’autre en avant de Sainte–Menehould, à droite de la grande route qui mène à Châlons, non loin de Bionne. La première ligne servait de camp à l’armée de Dumouriez. La seconde est séparée de la première par une vallée assez étroite, couverte à cette époque de profonds marécages, et comprend deux hauteurs : le mont d’Yvron et le tertre de Valmy. Le mont d’Yvron s’étend entre la Bionne et la butte de Valmy. Le tertre de Valmy, séparé de l’Yvron par une prairie où coule, durant quatre mois de l’année, le petit ruisseau de Coupré, doit son nom au village qui se cache derrière lui, dans le bas du vallon. Sa crête est étroite et escarpée ; elle était alors couronnée d’un moulin à vent qu’on voyait de très loin. Durant la journée du 20 Septembre, l’Yvron devait être occupé par l’avant-garde Dumouriez, et le tertre de Valmy, ou, comme on disait à cette époque, la butte du moulin, par le gros de l’armée Kellermann.
La grande route de Sainte-Menehould à Châlons laisse donc à sa droite l’Yvron et (à une petite lieue) le village de Valmy, à gauche Dampierre-sur-Auve et Gizaucourt. Elle passe par Dommartin-la-planchette, Orbeval et la Lune, pour descendre de là, presque en ligne droite jusqu’à Châlons, à travers une grande et triste plaine dont le sol crayeux commence à se couvrir de sapinières. C’est la route que Louis XVI avait suivie quinze mois auparavant, et suivie deux fois, la première fois en plein silence, heureux et se livrant à l’espoir, la seconde fois, abattu, désespéré, environné de gardes nationaux qui venaient en foule des villages du Clermontois, au son du tocsin, brandissant leurs fusils et leurs faux, criant non pas « vive le roi » mais « vive la nation » et « vivent les patriotes ». Orbeval était alors la première maison de poste avant Sainte-Menehould ; c’est là que l’inquiétude avait saisi les fugitifs qui ne voyaient venir aucun des détachements promis par M ; de Bouillé. C’est à Sainte-Menehould que le maitre de poste Drouet avait reconnu Louis XVI. C’est la descente de Dommartin-la-planchette, au bas de la Grèverie, que le comte de Dampierre, seigneur de Hans, avait été massacré sous les yeux de la famille royale, qui reprenait captive le chemin de Paris et peut être, le 22Juin 1791, en passant pour la seconde fois à Orbeval, Louis XI vit-il à droite de la route le moulin de Valmy. Il ne se doutait guère que sa destinée se déciderait irrévocablement l’année suivant près de ce moulin, et qu’au milieu des mornes plaines qu’il traversait, l’armée étrangère, désormais son unique espoir, viendrait s’épuiser dans l’inaction, la misère et la faim. La route en parlant d’Orbeval, s’élève par une longue rampe jusqu’à l’endroit où aboutissent deux chemins de traverse, celui de Somme-Bionne et celui de Gizaucourt. Ce carrefour porte le nom de la Lune qu’il doit, dit-on, à sa forme circulaire. On aperçoit de là Orbeval, Dommartin-la-planchette, le tertre de Valmy et la chaine de l’Argonne qui dessine dans le lointain ses sommets boisés. Il y avait alors au bord de la route une maison isolée qu’on nommait l’auberge – ou la cense – de la Lune. Ce lieu est très aride, sans plantation et sans ombrage, sans ruisseau, sans la moindre source ; il faut chercher l’eau jusqu’aux villages de Gizaucourt, de la Chapelle et de Saint-Mard où passe la rivière d’Auve. Au nord-est s’étend une plaine immense très fertile en froments ; mais au sud-ouest le sol, formé d’un calcaire crayeux, que recouvre à peine une légère couche de terre végétale, ne produit que des seigles et des marsages ; aussi, la limite de ce terroir stérile a-t-elle reçu le nom expressif de marche à famine. C’est sur ce plateau triste et désolé, le plateau de la Lune, que l’armée prussienne s’établit dans la journée du 20 septembre ; c’est de là que son artillerie canonna le tertre de Valmy ; c’et là qu’elle campa durant dix jours, en proie au découragement et à la dysenterie, dans de boueux bivouacs.

Kellermann était arrivé le 18 Septembre à Dampierre-le-château, dans la vallée de l’Yèvre, à quatre lieues de Sainte-Menehould. Il avait avec lui dix-sept bataillons d’infanterie et trente escadrons, en tout seize mille hommes. Il se hâta, sur le conseil e Dumouriez, d’envoyer au camp de Braux quelques détachements dont l’arrivée remplit les soldats de confiance et de joie ; l’armée des Ardennes était certaine désormais que l’armée du Centre venait à son secours et combattrait avec elle. »
Nous vous invitons à découvrir la suite de ce texte de Arthur Chuquet, en cliquant sur « Document joint - Chuquet » en bas de page.
Une seconde émission de la série « Les Académiciens racontent l’Histoire » vous permettra de découvrir d’autres textes d’Arthur Chuquet ; l’Académicien poursuivra le récit de cette journée mémorable ; vous pourrez écouter également des textes d’un autre historien, membre de l’Institut : Victor Duruy qui vous décrira le dénouement de cette bataille.
Site et Moulin de Valmy monument historique à 51800 - VALMY Tel. : +33 (0)3 26 60 85 83 tourisme@argonne.fr Voir le site web Dates d’ouverture :Du 01/01/2012 au 31/12/2012
Valmy, la première victoire des armées françaises depuis la déclaration de guerre du 20 avril 1792 à l’Autriche et la Prusse. C’est sous la plume de l’Académicien des sciences morales et politiques, Arthur Chuquet, que le récit de cette bataille va se poursuivre, il s’achèvera en seconde partie d’émission sous celle de Victor Duruy, membre libre de l’Académie des inscriptions et belles lettres en 1873, élu à l’Académie des sciences morales et politiques en 1879 et à l’Académie française en 1884.
Le contexte de la victoire de Valmy
La butte de Valmy est située sur le flanc ouest du massif de l’Argonne à mi-chemin entre Verdun et Paris. Au début septembre les troupes prussiennes du duc de Brunswick ont pris Verdun et se dirigent vers Paris, franchissant l’Argonne. Dumouriez a reçu l’ordre du ministère de la Guerre d’arrêter cette progression. Il fait placer Kellermann à deux lieux de Sainte-Menehould, dans une zone en creux dominée par la butte de Valmy. Le matin du 20 septembre, l’avant-garde prussienne débouche devant cette butte, que Kellermann décide d’occuper. En arrière, s’installe Dumouriez…
La biographie de Chuquet :
Arthur Chuquet né en 1853, mort en 1925 est critique et historien. La littérature germanique est sa formation initiale : il publie des éditions d’auteurs allemands ; puis il se fait connaître par de nombreuses publications sur l’histoire militaire de la Révolution française et de l’Empire.
Il fait partie des pionniers des études révolutionnaires et connaît une grande carrière d’universitaire sous la Troisième République. Comme les dix autres volumes de ses Guerres de la Révolution, le tome II intitulé Valmyest un ouvrage classique et important de l’historiographie militaire de la Révolution française. Écoutons et découvrons de nouveau la plume taillée avec précision d’Arthur Chuquet, grand admirateur de Dumouriez…
"Tout changeait dans la matinée du 20 septembre ; l’armée française était attaquée sur son front ; et Kellermann, désormais en première ligne, allait recevoir le choc des assaillants. Dumouriez aida généreusement son collègue. Il commanda à Stengel de se porter à l’extrémité de l’Yvron pour mieux couvrir la droite de Kellermann. Il plaça derrière Stengel seize bataillons formés en colonne, sous le commandement de Beurnonville qui devait se développer sur l’Yvron, si les ennemis tentaient d’attaquer Stengel ou de le tourner. Il envoya quelques escadrons de l’avant-garde de Dillon, sous la conduite de Frégeville, se joindre à la gauche de l’armée de Kellermann. Lorsqu’il apprit que Valence avait abandonné la hauteur de la Lune qui demeurait inoccupée, il donna l’ordre à Chazot de se porter avec neuf bataillons et huit escadrons, sur la grande route, de prendre possession du point le plus élevé de la montagne et d’arrêter prés de la maison de la Lune l’effort des assaillants. Grâce à ces dispositions, le plateau de Valmy était flanqué de toutes parts, et Kellermann, protégé sur ses deux ailes par les lieutenants de Dumouriez, ne pouvait être débordé.
Dumouriez conçut en outre une manœuvre audacieuse qui fait grand honneur à son génie militaire, mais que lui seul ou Stengel pouvait exécuter. Il s’agissait de tourner la gauche des prussiens ; douze bataillons et huit escadrons, commandés par le lieutenant-général Le Veneur, devaient franchir l’Aisne, au-dessus de la Neuville-au-Pont, et tout en appuyant la droite de Beurnonville, se porter par Berzieux et Virginy sur les derrières des alliés. En même temps, il ordonnait à Duval de rassembler ses troupes à Vienne-le-Château et de traverser l’Aisne, ainsi que Le Veneur, pour tomber sur les bagages des Prussiens, et il formait en colonnes, à l’extrémité de sa gauche, une réserve de douze bataillons et de six escadrons, prêts à déboucher sur le grand chemin pour soutenir Kellermann. C’est ainsi que Dumouriez passa la journée du 20 Septembre à son quartier général, envoyant de tous cotés des ordonnances et imprimant aux divers corps de son armée leur direction. Les habitants de Sainte-Menehould, entendant le canon gronder depuis ce matin, s’étonnaient que le général en chef ne se rendît pas de sa personne sur le champ de bataille et Dumouriez ne sortit de la ville qu’à dix heures. Mais les dispositions qu’il avait prises étaient sagement conçues et sauvèrent Kellermann.
Cependant, l’avant-garde prussienne restait immobile prés de la ferme de Maigneux. Le major Massenbach, suivi d’un officier russe, le compte de Forstenbourg, se dirige vers la Lune. Forstenbourg, aimable compagnon, chevaleresque, toujours le premier au feu, était fils naturel de Brunswick, et, comme disait Massenbach, le Vendôme de cet Henri IV. Les deux officiers arrivent à la grande route, devant l’auberge. « Que de chemin nous avons fait, s’écrit Forstenbourg en riant, nous voici dans la Lune ! » La maison offrait l’aspect le plus affreux. Le toit était criblé de boulets, et les tuiles brisées jonchaient le sol. Des blessés français gisaient sur la route et dans les fossés. Un d’eux attira l’attention de Massenbach ; c’était un jeune officier d’artillerie, au regard intelligent et fier ; il avait ses deux jambes fracassées. Le major, ému de pitié, le fit transporter dans l’auberge."
Découvrez la suite du déroulement de cette importante bataille dans l’Histoire de France, Valmy, en bas de page en cliquant sur « Document joint-Chuquet »
Le dénouement de cette bataille vous est exposé à présent grâce à un texte de l’Académicien Victor Duruy, historien et ministre à l’esprit libéral et positiviste.
Né en 1811 dans une famille d’artisans employés aux Gobelins et mort, à Paris, en 1894, Duruy est, entre François Guizot et Jules Ferry, un des grands organisateurs de l’instruction publique en France. Il est successivement professeur d’histoire, inspecteur de l’Académie de Paris, maître de conférences à l’École normale, inspecteur général et professeur à l’École polytechnique. Distingué par Napoléon III, qu’il a aidé dans ses recherches pour la Vie de César, il est de 1863 à 1869, ministre de l’instruction publique. Il accomplit des réformes importantes : rétablissement de l’agrégation de philosophie, suppression de la bifurcation (spécialisation des élèves jusqu’alors prématurée dès la quatrième, soit dans une section des Lettres, soit dans une section des Sciences), introduction de l’histoire contemporaine dans l’enseignement, création de l’enseignement secondaire spécial, ouverture de nombreuses écoles primaires. Pour enlever à l’Eglise le monopole de l’enseignement secondaire des jeunes filles de la bourgeoisie, Duruy organise pour elles un enseignement secondaire d’Etat. Dans l’enseignement supérieur, il fonde des laboratoires et crée à Paris l’Ecole des Hautes Etudes.
Enfin, il inaugure l’enseignement destiné au public, sous forme de cours pour adultes et de conférences dans les facultés. Après sa retraite il se consacre à ses études historiques. On lui doit un grand nombre d’ouvrages dont le plus important est sa grande Histoire des Romains.
Voici des extraits de son Histoire de France de 1789 à 1795, il s’agit du livre II : l’Assemblée législative ; chapitre VIII : Victoire de Valmy (20 septembre 1792)
"L’effort principal porta sur la butte de Valmy, où Kellermann avait pris position avec ses conscrits, que les émigrés appelaient des tailleurs et des cordonniers mais il se trouva que ces courtauds de boutique respiraient, comme de vieux soldats, l’odeur de la poudre. Ces conscrits supportèrent le feu avec un sang-froid sur lequel l’ennemi ne comptait pas. L’action ne fut guère qu’une canonnade de plusieurs heures. Les obus ayant mis le feu à quelques caissons des batteries françaises, l’explosion blessa ou tua beaucoup de monde, et il y eut un moment de désordre. Brunswick en profita pour lancer son infanterie en colonnes d’attaque. Kellermann les laisse avancer sans tirer un coup de feu, puis se met au u premier rang, et, au cri de Vive la nation ! Que toute la ligne répète, s’apprête à charger l’ennemi à la baïonnette. Ce cri immense qui se prolonge pendant plusieurs minutes, cette fière attitude, arrêtent les Prussiens ; le canon de Dumouriez laboure le flanc de leur colonne ; ils redescendent à la hâte et Brunswick fait cesser l’action (20 septembre). Le lendemain de Valmy, la Convention se réunissait et proclamait république. Sa première réponse aux négociations proposées par Brunswick fut digne du vieux sénat de Rome : »La république française ne peut entendre aucune proposition avant que les troupes prussiennes aient entièrement évacué le territoire français. « Les Prussiens, cruellement décimés par la disette et les maladies, commencèrent le 1er octobre leur mouvement pour sortir de France.
IX. DEFENSE DE LILLE, VICTOIRE DE JEMMAPES Pendant que Dumouriez arrêtait à Valmy l’armée d’invasion, mais la poussait mollement dans sa retraite, Custine, le long du Rhin, avait pris l’offensive, enlevé Spire, Worms, même la grande ville de Mayence. Sur les Alpes, Montesquiou conquit la Savoie, et Anselme le comté de Nice. Aux Pays-Bas, les Autrichiens avaient attaqué Lille avec une barbarie sauvage ; ils y avaient lancé six jours durant des bombes et des boulets rouges, qui y brûlèrent quatre cent cinquante maisons, en endommagèrent sept à huit cents, mais ne purent vaincre la constance de cette patriotique cité (29 sept.-7 oct.). On vint dire sur le rempart à un canonnier que sa maison brûlait : »Mon poste est ici, dit-il, feu pour feu ;c et il continua de servir sa pièce. Dumouriez arrivait avec l’armée de Valmy pour venger cette cruauté inutile. Il gagna la bataille de Jemmapes (6 novembre), qui nous donna les Pays-Bas. Le 13 novembre il entrait à Bruxelles. Un de ses lieutenants à Valmy et à Jemmapes avait été le fils du duc d’Orléans, plus tard le roi Louis-Philippe. Ainsi, dès la première campagne, la France nouvelle, formant sous le feu ses jeunes soldats, repoussait l’attaque des rois et mettait la main sur des terres à demi françaises que Louis XIV lui-même n’avait pu saisir.
A Valmy, le grand poète de l’Allemagne, Goethe, se trouvait
dans l’armée prussienne, non comme soldat, mais en curieux, car c’était moins une guerre que les coalisés croyaient faire qu’un voyage à Paris, une course rapide et au bout une entrée triomphale. Il partageait leur confiance présomptueuse ; le canon de Valmy dissipa cette fumée. Le soir, au bivouac, on demandait au poète de chasser avec sa verve ordinaire les sinistres pressentiments qui déjà s’éveillaient. Mais ils l’avaient saisi lui-même ; il resta longtemps silencieux. Lorsqu’il parla enfin, sa voix était grave, ô solennelle, et il ne dit que ces mots : "En ce lieu et dans ce jour, commence une nouvelle époque pour l’histoire du monde."
Nous retournons dans le texte de Duruy pour écouter ces 2 phrases finales qui clôturent nos 2 émissions de la série « Les Académiciens racontent l’Histoire » consacrées à la bataille de Valmy qui fut le signe que le phénomène révolutionnaire était irréversible.
A Paris, le même jour, le 20 septembre 1792, la Convention se réunit pour la première fois.
Le 21 septembre 1792 tous les députés de la Convention votent l’abolition de la royauté et, dès le lendemain, décident de dater les actes officiels de « l’an I de la République ».
"La royauté avait succombé le 10 août. La Convention n’avait plus qu’à écrire dans la loi ce qui existait déjà dans les faits : son premier acte fut de proclamer la république."
Vous pouvez télécharger les 2 émissions décrivant la bataille de Valmy. La 1ère de ces 2 émissions propose des lectures des textes des Académiciens Historiens : Jules Michelet de l’Académie des sciences morales et politiques, Arthus Chuquet de l’Académie des sciences morales et politiques et Victor Duruy, membre de l’Académie des Inscriptions et belles lettres, de l’Académie des sciences morales et politiques et de l’Académie française.
Site et Moulin de Valmy monument historique à 51800 - VALMY Tel. : +33 (0)3 26 60 85 83 tourisme@argonne.fr Voir le site web Dates d’ouverture :Du 01/01/2012 au 31/12/2012
Écoutez la première partie de cette émission : Les Académiciens racontent l’histoire : La victoire de Valmy, heure de gloire de la Révolution (1/2)
Valmy, la première victoire des armées françaises depuis la déclaration de guerre du 20 avril 1792 à l’Autriche et la Prusse. C’est sous la plume de l’Académicien des sciences morales et politiques, Arthur Chuquet, que le récit de cette bataille va se poursuivre, il s’achèvera en seconde partie d’émission sous celle de Victor Duruy, membre libre de l’Académie des inscriptions et belles lettres en 1873, élu à l’Académie des sciences morales et politiques en 1879 et à l’Académie française en 1884.
Le contexte de la victoire de Valmy
La butte de Valmy est située sur le flanc ouest du massif de l’Argonne à mi-chemin entre Verdun et Paris. Au début septembre les troupes prussiennes du duc de Brunswick ont pris Verdun et se dirigent vers Paris, franchissant l’Argonne. Dumouriez a reçu l’ordre du ministère de la Guerre d’arrêter cette progression. Il fait placer Kellermann à deux lieux de Sainte-Menehould, dans une zone en creux dominée par la butte de Valmy. Le matin du 20 septembre, l’avant-garde prussienne débouche devant cette butte, que Kellermann décide d’occuper. En arrière, s’installe Dumouriez…
La biographie de Chuquet :
Arthur Chuquet né en 1853, mort en 1925 est critique et historien. La littérature germanique est sa formation initiale : il publie des éditions d’auteurs allemands ; puis il se fait connaître par de nombreuses publications sur l’histoire militaire de la Révolution française et de l’Empire.
Il fait partie des pionniers des études révolutionnaires et connaît une grande carrière d’universitaire sous la Troisième République. Comme les dix autres volumes de ses Guerres de la Révolution, le tome II intitulé Valmyest un ouvrage classique et important de l’historiographie militaire de la Révolution française. Écoutons et découvrons de nouveau la plume taillée avec précision d’Arthur Chuquet, grand admirateur de Dumouriez…
"Tout changeait dans la matinée du 20 septembre ; l’armée française était attaquée sur son front ; et Kellermann, désormais en première ligne, allait recevoir le choc des assaillants. Dumouriez aida généreusement son collègue. Il commanda à Stengel de se porter à l’extrémité de l’Yvron pour mieux couvrir la droite de Kellermann. Il plaça derrière Stengel seize bataillons formés en colonne, sous le commandement de Beurnonville qui devait se développer sur l’Yvron, si les ennemis tentaient d’attaquer Stengel ou de le tourner. Il envoya quelques escadrons de l’avant-garde de Dillon, sous la conduite de Frégeville, se joindre à la gauche de l’armée de Kellermann. Lorsqu’il apprit que Valence avait abandonné la hauteur de la Lune qui demeurait inoccupée, il donna l’ordre à Chazot de se porter avec neuf bataillons et huit escadrons, sur la grande route, de prendre possession du point le plus élevé de la montagne et d’arrêter prés de la maison de la Lune l’effort des assaillants. Grâce à ces dispositions, le plateau de Valmy était flanqué de toutes parts, et Kellermann, protégé sur ses deux ailes par les lieutenants de Dumouriez, ne pouvait être débordé.
Dumouriez conçut en outre une manœuvre audacieuse qui fait grand honneur à son génie militaire, mais que lui seul ou Stengel pouvait exécuter. Il s’agissait de tourner la gauche des prussiens ; douze bataillons et huit escadrons, commandés par le lieutenant-général Le Veneur, devaient franchir l’Aisne, au-dessus de la Neuville-au-Pont, et tout en appuyant la droite de Beurnonville, se porter par Berzieux et Virginy sur les derrières des alliés. En même temps, il ordonnait à Duval de rassembler ses troupes à Vienne-le-Château et de traverser l’Aisne, ainsi que Le Veneur, pour tomber sur les bagages des Prussiens, et il formait en colonnes, à l’extrémité de sa gauche, une réserve de douze bataillons et de six escadrons, prêts à déboucher sur le grand chemin pour soutenir Kellermann. C’est ainsi que Dumouriez passa la journée du 20 Septembre à son quartier général, envoyant de tous cotés des ordonnances et imprimant aux divers corps de son armée leur direction. Les habitants de Sainte-Menehould, entendant le canon gronder depuis ce matin, s’étonnaient que le général en chef ne se rendît pas de sa personne sur le champ de bataille et Dumouriez ne sortit de la ville qu’à dix heures. Mais les dispositions qu’il avait prises étaient sagement conçues et sauvèrent Kellermann.
Cependant, l’avant-garde prussienne restait immobile prés de la ferme de Maigneux. Le major Massenbach, suivi d’un officier russe, le compte de Forstenbourg, se dirige vers la Lune. Forstenbourg, aimable compagnon, chevaleresque, toujours le premier au feu, était fils naturel de Brunswick, et, comme disait Massenbach, le Vendôme de cet Henri IV. Les deux officiers arrivent à la grande route, devant l’auberge. « Que de chemin nous avons fait, s’écrit Forstenbourg en riant, nous voici dans la Lune ! » La maison offrait l’aspect le plus affreux. Le toit était criblé de boulets, et les tuiles brisées jonchaient le sol. Des blessés français gisaient sur la route et dans les fossés. Un d’eux attira l’attention de Massenbach ; c’était un jeune officier d’artillerie, au regard intelligent et fier ; il avait ses deux jambes fracassées. Le major, ému de pitié, le fit transporter dans l’auberge."
Découvrez la suite du déroulement de cette importante bataille dans l’Histoire de France, Valmy, en bas de page en cliquant sur « Document joint-Chuquet »
Le dénouement de cette bataille vous est exposé à présent grâce à un texte de l’Académicien Victor Duruy, historien et ministre à l’esprit libéral et positiviste.
Né en 1811 dans une famille d’artisans employés aux Gobelins et mort, à Paris, en 1894, Duruy est, entre François Guizot et Jules Ferry, un des grands organisateurs de l’instruction publique en France. Il est successivement professeur d’histoire, inspecteur de l’Académie de Paris, maître de conférences à l’École normale, inspecteur général et professeur à l’École polytechnique. Distingué par Napoléon III, qu’il a aidé dans ses recherches pour la Vie de César, il est de 1863 à 1869, ministre de l’instruction publique. Il accomplit des réformes importantes : rétablissement de l’agrégation de philosophie, suppression de la bifurcation (spécialisation des élèves jusqu’alors prématurée dès la quatrième, soit dans une section des Lettres, soit dans une section des Sciences), introduction de l’histoire contemporaine dans l’enseignement, création de l’enseignement secondaire spécial, ouverture de nombreuses écoles primaires. Pour enlever à l’Eglise le monopole de l’enseignement secondaire des jeunes filles de la bourgeoisie, Duruy organise pour elles un enseignement secondaire d’Etat. Dans l’enseignement supérieur, il fonde des laboratoires et crée à Paris l’Ecole des Hautes Etudes.
Enfin, il inaugure l’enseignement destiné au public, sous forme de cours pour adultes et de conférences dans les facultés. Après sa retraite il se consacre à ses études historiques. On lui doit un grand nombre d’ouvrages dont le plus important est sa grande Histoire des Romains.
Voici des extraits de son Histoire de France de 1789 à 1795, il s’agit du livre II : l’Assemblée législative ; chapitre VIII : Victoire de Valmy (20 septembre 1792)
"L’effort principal porta sur la butte de Valmy, où Kellermann avait pris position avec ses conscrits, que les émigrés appelaient des tailleurs et des cordonniers mais il se trouva que ces courtauds de boutique respiraient, comme de vieux soldats, l’odeur de la poudre. Ces conscrits supportèrent le feu avec un sang-froid sur lequel l’ennemi ne comptait pas. L’action ne fut guère qu’une canonnade de plusieurs heures. Les obus ayant mis le feu à quelques caissons des batteries françaises, l’explosion blessa ou tua beaucoup de monde, et il y eut un moment de désordre. Brunswick en profita pour lancer son infanterie en colonnes d’attaque. Kellermann les laisse avancer sans tirer un coup de feu, puis se met au u premier rang, et, au cri de Vive la nation ! Que toute la ligne répète, s’apprête à charger l’ennemi à la baïonnette. Ce cri immense qui se prolonge pendant plusieurs minutes, cette fière attitude, arrêtent les Prussiens ; le canon de Dumouriez laboure le flanc de leur colonne ; ils redescendent à la hâte et Brunswick fait cesser l’action (20 septembre). Le lendemain de Valmy, la Convention se réunissait et proclamait république. Sa première réponse aux négociations proposées par Brunswick fut digne du vieux sénat de Rome : »La république française ne peut entendre aucune proposition avant que les troupes prussiennes aient entièrement évacué le territoire français. « Les Prussiens, cruellement décimés par la disette et les maladies, commencèrent le 1er octobre leur mouvement pour sortir de France.
IX. DEFENSE DE LILLE, VICTOIRE DE JEMMAPES Pendant que Dumouriez arrêtait à Valmy l’armée d’invasion, mais la poussait mollement dans sa retraite, Custine, le long du Rhin, avait pris l’offensive, enlevé Spire, Worms, même la grande ville de Mayence. Sur les Alpes, Montesquiou conquit la Savoie, et Anselme le comté de Nice. Aux Pays-Bas, les Autrichiens avaient attaqué Lille avec une barbarie sauvage ; ils y avaient lancé six jours durant des bombes et des boulets rouges, qui y brûlèrent quatre cent cinquante maisons, en endommagèrent sept à huit cents, mais ne purent vaincre la constance de cette patriotique cité (29 sept.-7 oct.). On vint dire sur le rempart à un canonnier que sa maison brûlait : »Mon poste est ici, dit-il, feu pour feu ;c et il continua de servir sa pièce. Dumouriez arrivait avec l’armée de Valmy pour venger cette cruauté inutile. Il gagna la bataille de Jemmapes (6 novembre), qui nous donna les Pays-Bas. Le 13 novembre il entrait à Bruxelles. Un de ses lieutenants à Valmy et à Jemmapes avait été le fils du duc d’Orléans, plus tard le roi Louis-Philippe. Ainsi, dès la première campagne, la France nouvelle, formant sous le feu ses jeunes soldats, repoussait l’attaque des rois et mettait la main sur des terres à demi françaises que Louis XIV lui-même n’avait pu saisir.
A Valmy, le grand poète de l’Allemagne, Goethe, se trouvait
dans l’armée prussienne, non comme soldat, mais en curieux, car c’était moins une guerre que les coalisés croyaient faire qu’un voyage à Paris, une course rapide et au bout une entrée triomphale. Il partageait leur confiance présomptueuse ; le canon de Valmy dissipa cette fumée. Le soir, au bivouac, on demandait au poète de chasser avec sa verve ordinaire les sinistres pressentiments qui déjà s’éveillaient. Mais ils l’avaient saisi lui-même ; il resta longtemps silencieux. Lorsqu’il parla enfin, sa voix était grave, ô solennelle, et il ne dit que ces mots : "En ce lieu et dans ce jour, commence une nouvelle époque pour l’histoire du monde."
Nous retournons dans le texte de Duruy pour écouter ces 2 phrases finales qui clôturent nos 2 émissions de la série « Les Académiciens racontent l’Histoire » consacrées à la bataille de Valmy qui fut le signe que le phénomène révolutionnaire était irréversible.
A Paris, le même jour, le 20 septembre 1792, la Convention se réunit pour la première fois.
Le 21 septembre 1792 tous les députés de la Convention votent l’abolition de la royauté et, dès le lendemain, décident de dater les actes officiels de « l’an I de la République ».
"La royauté avait succombé le 10 août. La Convention n’avait plus qu’à écrire dans la loi ce qui existait déjà dans les faits : son premier acte fut de proclamer la république."
Vous pouvez télécharger les 2 émissions décrivant la bataille de Valmy. La 1ère de ces 2 émissions propose des lectures des textes des Académiciens Historiens : Jules Michelet de l’Académie des sciences morales et politiques, Arthus Chuquet de l’Académie des sciences morales et politiques et Victor Duruy, membre de l’Académie des Inscriptions et belles lettres, de l’Académie des sciences morales et politiques et de l’Académie française.
Site et Moulin de Valmy monument historique à 51800 - VALMY Tel. : +33 (0)3 26 60 85 83 tourisme@argonne.fr Voir le site web Dates d’ouverture :Du 01/01/2012 au 31/12/2012
Écoutez la première partie de cette émission : Les Académiciens racontent l’histoire : La victoire de Valmy, heure de gloire de la Révolution (1/2)